Terraé : un réseau de 400 agriculteurs.

 Article publié dans le journal L'Avenir national, toutes éditions, le 13 novembre 2023.



Dix-huit Groupements d’Agriculteurs en Agroécologie (GAA) ont vu le jour en 2023. Ils testent leurs idées dans leurs champs.

La Wallonie souhaitant soutenir la transition agroécologique en accompagnant les agriculteurs via la création de groupements et la diffusion des savoir-faire a créé un plan comportant plusieurs actions rassemblées sous la bannière "Terraé". L’ensemble des actions est piloté par le SPW Agriculture, Ressources Naturelles et Environnement. Un groupe coeur de 40 agriculteurs créé il y a un an et demi a été enrichi de 360 autres agriculteurs cette année.

Ce deuxième pan de l’histoire Terraé commence en juillet 2022 quand la ministre wallonne de l’environnement, Céline Tellier, annonce un appel à projet visant à constituer des groupes d’agriculteurs en agroécologie (GAA). L’objectif wallon est de constituer 14 groupes de minimum 20 agriculteurs. L’appel à projet récolte un grand succès et suscite de bonnes idées. Ils seront finalement 18 groupes élus par le jury. Parmi eux, un groupe local de 20 agriculteurs cultivant sur les communes de Hélécine, Orp-Jauche, Ramillies, Jodoigne et Perwez (HORJ-PBW) est accompagné dans leur transition économique et agroécologique par le Centre provincial de l'agriculture et de la ruralité du Brabant wallon (CPAR). Pierre Noël, ingénieur agronome au CPAR, ne cache pas ses ambitions : « on commence pendant trois ans sur une zone pilote, puis si l’engouement prend, notre ambition est d’étendre l’action sur tout le Brabant wallon. Travailler sur des groupes locaux nous semble intéressant pour favoriser les interconnections entre agriculteurs. »

Les autres GAA ne sont pas tous formés sur base géographique, ils le sont aussi sur des thématiques spécifiques telles que l’agriculture biologique de conservation des sols, l’autonomie alimentaire des animaux (fini les achats d’aliments), l’agroforesterie, la fabrication et l’essai de bio-intrants (purins d’orties et autres végétaux, l’enrobage de semences par du jus de composts, …)

La semaine dernière à Perwez, le GAA HORJ-PBW se réunissait autour d’un essai sur les couverts végétaux dont l’idée avait émané d’un des agriculteurs du groupe : Benoît Lempereur. Les couverts végétaux, ce sont ces plantes que l’on sème après la culture principale, en attendant la suivante, pour couvrir le sol. Ces couverts ne seront pas récoltés, ils enrichiront le sol tel un compost. Pour l’occasion, un spécialiste de la question était invité pour apporter ses connaissances et répondre aux questions du groupe : François Dessart  de l’ASBL Greenotec.

Benoît Lempereur l’annonce d’entrée de jeu : « je n’ai pas attendu les GAA pour faire de l’agroécologie, même mon père plantait déjà des moutardes après la moisson ». La nuance est vite apportée par le spécialiste de l’agriculture de conservation des sols, François Dessart : « planter de la moutarde, c’est faire l’ascenseur et récupérer les restes d’engrais pour qu’ils n’aillent pas dans les nappes phréatiques, c’est un premier pas vers l’agroécologie mais ce n’est pas suffisant. Ce qu’on cherche avec les couverts végétaux c’est une maximisation des services rendus par la nature. Il faut donc minimum quatre espèces différentes dont des légumineuses dans le couvert végétal pour optimiser les services rendus par les plantes : nourrir le sol, nourrir la future culture, optimiser l’exploration du sol par différents systèmes racinaires, capter du carbone, augmenter la fertilité naturelle du sol, favoriser l’infiltration de l’eau et son stockage, et j’en passe. » Et c’est bien ce que testait Benoît Lempereur dans le cadre de son GAA : une multitude de semences différentes associées les unes avec les autres.

L’agroécologie marque un point de plus

Un pas de plus pour la transition de l’agriculture wallonne : une plateforme d’information dédiée à l’agroécologie vient d’être mise en ligne.

C’était annoncé dans la Déclaration de politique régionale 2019-2024 : « le Gouvernement wallon soutiendra les programmes de formation et d’accompagnement vers les pratiques agroécologiques, basées sur les meilleures connaissances scientifiques agronomiques et écologiques, en vue de promouvoir les pratiques culturales visant à la fois la qualité de la production, la préservation de l’environnement, de la biodiversité et des sols et le développement de l’emploi ». Si on y ajoute le souhait du Gouvernement de « renforcer le rôle du Centre wallon de Recherches agronomiques (CRA-W) dans l'accompagnement des producteurs et le développement de l'innovation dans une perspective de promotion des nouveaux modes de production (bio, agroécologie, permaculture, etc.) », voilà une belle épine hors du pied du Gouvernement à la veille des prochaines élections. La sortie sur la toile du nouveau site www.terrae-agroecologie.be apporte une trame de fond à tout agriculteur ou conseiller qui souhaite avancer, se renseigner, partager autour d’un thème  central : l’agroécologie.

Le site internet a été créé par le projet « Terraé » dont le cœur est actionné par trois ASBL et un centre de recherche, le tout financé par le plan de relance de la Wallonie. Développé par Natagriwal, Greenotec, Fourrages Mieux et le CRA-W, ce site internet a pour objectif de promouvoir l’agroécologie et de faire évoluer les pratiques. Il contient entre autres des témoignages, des fiches techniques, des vidéos, un agenda d’événements.

Sophie Demol a été engagée il y un an et demi par une des trois ASBL, Natagriwal. Elle n’en est pas à son coup d’essai en matière de communication sur des projets visant à apporter plus d’environnement en agriculture puisqu’elle a œuvré pendant cinq ans au sein de l’ASBL Corder pour piloter les formations phytolicence. Ces formations obligatoires depuis 2015 pour toute personne professionnelle devant utiliser des pesticides. La chargée de communication du projet précise : « la plateforme est en ligne avec ses premiers contenus, elle va évoluer et s’enrichir dans les mois et les années à venir. Nous espérons qu’elle suscitera beaucoup d’intérêt, qu’elle aidera les agriculteurs et les agricultrices dans leur transition, et que le monde agricole wallon se l’appropriera pour y partager des contenus. »

 

 Article publié dans L'Avenir, édition nationale du 13/11/2023