Le semis direct pour réussir dans la sécheresse

Un tour de plaine virtuel a permis à un agriculteur grézien d’expliquer comment il était parvenu à semer un couvert végétal malgré la sécheresse.



C’est au milieu d’un champ de couvert végétal composé de phacélie, d’avoine et de vesce que Géraud Dumont de Chassart explique comment il a réussi à obtenir un si beau résultat en semant son couvert en pleine canicule, le 14 août 2020. Pour y parvenir, il n’y a pas de recette unique mais un long processus d’évolution qui a germé il y a plus de vingt ans.

« Je n’ai jamais connu la charrue sur la ferme. Mon père a commencé à arrêter le labour progressivement il y a 25 ans suite à un hiver où il s’est retrouvé sans avoir jamais le temps de labourer. » Son père avait d’autres activités professionnelles et la météo pluvieuse n’avait pas aidé non plus. Il a donc modifié sa manière de travailler. « Vu le gain de temps et l’économie de carburant, il y a pris goût, et depuis 2000 on n’a plus jamais ressorti la charrue ». Géraud Dumont de Chassart annonce d’emblée la couleur : il ne laboure plus.

Pour préparer le sol, il utilise alors un décompacteur. Mais ce n’était finalement qu’une étape intermédiaire, aujourd’hui, plus de décompactage, ce sont les couverts végétaux et les vers de terre qui se chargent d’assurer au sol une bonne structure. Pour semer, il implante les graines dans un champ couvert de végétation grâce à un semoir spécifique de « semis direct ».

Géraud continue sa démonstration : « En remplacement de la charrue, mon père avait fait fabriquer son propre décompacteur par un constructeur local. D’année en année, il en a modifié la dent pour éviter de lisser le sol en profondeur. Puis on a encore simplifié le travail du sol. Dans les pailles hachées, après la moisson, on était souvent embêtés pour semer, on a acheté d’occasion un semoir à dents spécifiques qui avait 20 ans d’âge. Vu les étés secs, c’est devenu une évidence. On lui a mis des pointes fines pour remuer le moins possible le sol. Il y a deux ans, on en est venu au semis direct grâce à la location d’un semoir spécifique de l’association Regenacterre à Perwez. Puis on a fait le pas, on a acheté, toujours d’occasion, notre propre semoir de semis direct. Aujourd’hui, on l’utilise pour semer les couverts. Pour les cultures, on se fait encore la main et on avance progressivement ».

 

Que recommander à un agriculteur qui commence ?

« Le mieux c’est un semoir de semis direct avec les dents les plus fines possibles pour ne pas avoir les même inconvénients qu’en labour quant au lissage qui crée des horizons imperméables au travers duquel les racines ne peuvent pas pousser. » La technique est abordable, avec un simple outil à dent, style déchaumeur, on peut déjà commencer. Des tutoriels sont disponibles sur YouTube, la technique vient d’exploser ces deux dernières années en France où ils rencontrent avant nous les problèmes de sécheresse.

La démonstration de Géraud peut être écoutée dans son entièreté sur la page Facebook de Greenotec.


Le semis direct

Le semis direct se définit par une absence de travail du sol (ni retournement, ni décompactage, ni préparation du lit de semence). Les caractéristiques du sol favorables au développement des cultures sont créées par l’activité biologique du sol puis préservées par un couvert végétal.

Le semis direct relevait presque de l’utopie il y a peu. Il a fallu quelques pionniers pour le mettre en pratique. En Brabant-wallon, aujourd’hui, il est pratiqué dans une quinzaine de fermes.

 

Un tour de plaine virtuel

L’ASBL Greenotec n’a pas annulé son tour de plaine suite aux mesures COVID. Elle en a fait une opportunité pour se lancer dans le Facebook Live.

Un téléphone portable pour filmer, un réseau 4G trouvé en pleine campagne, un parapluie pour contrer le sifflement du vent, des petits gars qui ont de la suite dans les idées et la furieuse envie de faire avancer l’agriculture. Voilà les ingrédients du premier Facebook Live en direct de Grez Doiceau, chez Géraud Dumont de Chassart, agriculteur de 30 ans. L’événement était organisé par l’ASBL Greenotec, association créée par des agriculteurs et soutenue par la Wallonie pour favoriser le développement de l’agroécologie.

« C’est vraiment une première » commente François Dessart, conseiller agricole chez Greenotec. « A la base on avait prévu un tour de plaine avec les agriculteurs pour échanger sur les pratiques de semis en période de sécheresse. Vu les mesures COVID, on a tenté un Facebook Live plutôt que d’annuler. »

Le sujet était d’actualité : « Comment semer un couvert en période de sécheresse ». Les couverts ce sont ces cultures que l’on plante après la culture principale, en fin d’été souvent, pour protéger le sol et continuer de profiter de l’énergie solaire gratuite pour nourrir ses habitants (lire l’article paru dans L’Avenir du 22 octobre 2020). Suite aux sécheresses récurrentes de l’été, ces couverts sont de plus en plus difficiles à implanter. Et pourtant, une fois installées, leurs racines vont transformer le sol en véritable éponge qui pourra retenir l’eau tombée en hiver afin qu’elle profite aux cultures l’été quand l’humidité se fera plus rare.

Un gain de temps précieux

40 minutes pour le premier plan dans les champs, 5 minutes pour le deuxième plan à côté du semoir. Là où un agriculteur doit consacrer une demi-journée pour un tour de plaine classique, ici en une heure, c’est plié. L’agriculteur pour qui le temps est une denrée rare, reçoit une information de qualité pour avancer dans ses pratiques, tout en restant au chaud dans son bureau.

« Au final, on a touché plus de gens que dans un tour de plaine classique. On n’a peut-être pas pu toucher les mottes de sol pour en apprécier la qualité, mais grâce aux zooms de la caméra, on a pu mieux observer sa structure que si on étaient attroupés à vingt » se réjouit François Dessart.

Au total, 56 personnes ont suivi le tour de plaine en direct et c’est sans compter le revisionnage : la séquence tournée en Facebook Live peut être revue depuis la page de Greenotec sur Facebook.