Renouveler sa phytolicence

La première échéance phytolicence arrive à grands pas. Il est temps pour certains de retourner en formation. Laurence Janssens, coordinatrice de l'ASBL CORDER, fait le point dans une interview parue dans L'Avenir le 16/08/2019.
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CORDER, l’ASBL qui informe les agriculteurs

L’ASBL CORDER à Louvain-la-Neuve se veut être un acteur objectif et une interface entre la recherche et le terrain en matière de protection des plantes.

A l’heure où la diminution des pesticides et les scénarios d’avenir pour l’agriculture passent dans tous les médias, des acteurs agissent dans l’ombre au quotidien depuis plus de 25 ans en ce sens.

L’étude « scénagri » commanditée par le ministre wallon de l’Environnement à la faculté d’agronomie de l’UCLouvain a sorti ses conclusions. Il s’agissait d’étudier la mise en œuvre d’un passage du modèle agricole actuel à un modèle sans produits phytopharmaceutiques. En très gros résumé : si on continue comme aujourd’hui, la diminution des pesticides sera de 19%. Si on opte pour un modèle promouvant l’agroécologie, les pesticides peuvent diminuer de 44% d’ici les trente années à venir.

En amont de ces études prospectives, de nombreux acteurs œuvrent déjà au quotidien pour aller en ce sens. C’est le cas de l’ASBL CORDER pour COordination, Recherche et DEveloppement Rural, basée à Louvain-la-Neuve, peu connue malgré qu’elle existe depuis déjà 25 ans. Leur objectif premier n’est pas de diminuer les pesticides, mais cette diminution est une conséquence de leur leitmotiv : faire interagir les acteurs du monde rural afin d’utiliser correctement les pesticides ! La recherche d’une part qui doit sortir de ses laboratoires et aller à la rencontre des besoins du terrain. Les agriculteurs et les jardiniers d’autre part qui ont besoin de connaissances et de réponses à leurs questions. Savoir reconnaitre une maladie sur les plantes, attendre le seuil d’intervention avant de traiter, connaître les produits à disposition, leur contenu, les risques encourus quand on les applique, les conditions météorologiques propices, … Autant de connaissances compliquées et pointues qu’il faut pouvoir gérer quand on est agriculteur ou entrepreneur de parcs et jardins. Une des cellules de l’ASBL CORDER est la Clinique des Plantes, qui participe notamment à la rédaction des avertissements CePiCOP dont nous avons parlé dans l’édition du 4 juillet 2019. Durant la saison de croissance des froments et escourgeons, ces avertissements encouragent les agriculteurs à réduire les pesticides.

L’ASBL CORDER emploie aujourd’hui 15 personnes et est coordonnée par l’ingénieur agronome Laurence Janssens : « Nous nous voulons initiateurs de discussions et nous sommes un acteur objectif dans le contexte sociétal et législatif actuel autour de la problématique des produits de protection des plantes. Il est important d’avoir des chiffres permettant de suivre de façon précise l’évolution des pratiques mises en place et des substances utilisées ».

Les pétitions d’interdiction des pesticides se signent à gogo dans le grand public mais ces mêmes signataires seraient-ils prêts également à signer des pétitions imposant la fermeture de toutes les pharmacies ? « En médecine, on va chez le pharmacien. Pour la santé des plantes, c’est un peu la même chose » explique Laurence Janssens. « Soigner les plantes est un enjeu nécessaire de l’agriculture. Le tout est d’utiliser d’abord des moyens préventifs afin d’éviter la maladie. Puis, si la maladie est avérée, d’apporter le traitement nécessaire correctement et à bon escient ».

 

Licence obligatoire pour utiliser des pesticides

Les premières phytolicences arriveront à échéance en 2020. Il est temps pour les agriculteurs et les jardiniers de se former à nouveau. 

L’ASBL CORDER est divisée en trois cellules : la Clinique des Plantes, le Comité régional PHYTO et la cellule Phytolicence et Appui Scientifique. Cette dernière cellule est entre autres chargée de coordonner, de suivre et d’évaluer la mise en place de la phytolicence en Wallonie.

La phytolicence est ce nouvel outil réglementaire d’application depuis le 25 novembre 2015. Tout utilisateur professionnel ou vendeur de produits phytopharmaceutiques doit disposer de ce « permis », qu’il soit agriculteur, ouvrier agricole, vendeur, conseiller, pour le monde agricole ou en jardinerie. Pour obtenir la phytolicence, un agriculteur ou un entrepreneur de parcs et jardins devra d’abord prouver qu’il possède les compétences nécessaires, grâce à son diplôme ou en réussissant une évaluation. Ensuite, tous les six ans, il devra renouveler sa phytolicence. Pour cela il devra avoir suivi des formations.

Laurence Janssens analyse la situation à l’échelle de la Wallonie : « En 2018, 199 formations ont été organisées et c’est toujours un succès quant au nombre de participants. Il est vrai qu’il faut continuellement renouveler l’offre de formation et c’est un challenge. Nous manquons de formateurs et de nouveaux sujets. Les détenteurs de phytolicence ne sont pas suffisamment informés quant à l’offre de formations et aux conditions de renouvellement des licences. 

Une première échéance arrive car les premiers renouvellements sont programmés en 2020. Parmi ceux qui détiennent une phytolicence « usage professionnel – P2 » expirant en 2020, seulement 7% des personnes ont suivi les formations nécessaires à leur renouvellement et 67% n'en ont encore suivi aucune ! Les agriculteurs et les entrepreneurs de parcs et jardins doivent vérifier la date de validité de leur phytolicence afin d’anticiper et continuer de suivre les formations ».

Tout utilisateur professionnel, qu’il soit agriculteur ou entrepreneur de parcs et jardins, doit avoir une phytolicence pour utiliser les produits phytopharmaceutiques. Un utilisateur averti en vaut deux !

www.phytolicence.be (le site fédéral)

www.pwrp.be/phytolicence (le site régional)