Denis Vandevoorde, pionnier de l'agriculture de conservation des sols

Denis Vandevoorde cultive à Court-st-Etienne en "non labour" depuis plus de trente ans. Il est l'un des premiers agriculteurs du Brabant-wallon à s'être lancés dans l'aventure à cause de problèmes d'érosion de ses terres.

L'agriculture de conservation en festival

Plus de 700 agriculteurs ont participé au premier festival de l’agriculture de conservation des sols le 16 juin à Villers-la-Ville.

Des bancs de brasseur dans un hangar à pommes-de-terre, un écran de projection dans la pénombre, un orateur et son micro, des agriculteurs en bottes. Ils étaient plus de 400 le 16 juin à Villers-la-Ville pour écouter la conférence inaugurale du premier festival de l’agriculture de conservation. La qualité de l’orateur français, Xavier Salducci, les a fait venir de loin :

Brabant-wallon, Liège, Thudinie, Metz, Rouen, Troye-en-Champagne, ... L’agriculture de conservation a déjà ses adeptes mais fait également venir de nombreux curieux à la recherche de nouvelles pratiques, plus respectueuses des sols, utilisant moins de produits phytosanitaires et se passant du labour. Le représentant du Ministre wallon de l’agriculture, René Colin, a confirmé son soutien à l’asbl organisatrice, Greenotec fortement aidée pour l’occasion par deux employés du service de vulgarisation agricole de la Wallonie. Coup de chapeau, la représentante du Ministre wallon de l’environnement, Carlo Di Antonio, a annoncé la mise à disposition d’un budget supplémentaire qui permettra à Greenotec d’amplifier sa communication sur l’agriculture de conservation des sols. D’autres membres de ces cabinets ministériels et de l’administration de l’agriculture et de l’environnement étaient également présents, c’est dire si le sujet commence à les attirer sérieusement. Il faut savoir que le Ministre français de l’agriculture Stefan Le Foll propose l’agriculture de conservation également comme mesure pour lutter contre le réchauffement climatique. Une augmentation de 4/1000 par an (soit 0,4 %) de la matière organique dans tous les sols agricoles pourrait compenser les émissions de gaz à effet de serre de la planète entière en séquestrant le carbone dans les sols. A l’échelle d’un pays, l’objectif paraît presque facilement réalisable. Et c’est bien là l’objectif de l’agriculture de conservation des sols et de la conférence inaugurale du festival : comment augmenter la matière organique dans les sols (et donc le carbone).

La journée s’est poursuivie dans les champs. Malgré la pluie, ils étaient plus de 700 agriculteurs à fouler les 7 hectares mis à disposition par Guibert Dumont de Chassart, agriculteur et administrateur de l’asbl Greenotec, pour accueillir le festival. Des asbl actives dans le conseil agricole (Nitrawal, Natagriwal, CIPF, IRBAB, FIWAP…), la cellule GISER, le centre de recherche agricole wallon et l’UCL avaient implanté des petites parcelles 4 mois auparavant afin d’offrir une vitrine de différentes techniques utilisables en agriculture de conservation. Une seconde conférence a ponctué l’après-midi et attisé les curiosités : celle du  suisse Nicolas Courtois avec ses innombrables idées et conseils sur les couverts végétaux.

Une agriculture plus exigeante et plus technique

Denis Vandevoorde cultive à Court-st-Etienne en non labour depuis plus de 30 ans. Il est un des premiers agriculteurs du Brabant-wallon à s’être lancé dans l’aventure. A la base, des problèmes d’érosion de ses terres et des ravines qui se creusaient dans les champs. Après la construction de la nationale 25, l’effet fut marquant : les eaux en provenance d’un bassin versant agricole d’une quarantaine d’hectares s’écoulaient le long de la route, emportant de la boue qui bouchait les avaloirs. La N25  se transformait en piscine. Ses champs se vidaient de leur couche de terre fertile, riche en matière organique.

C’est grâce à des formations suivies en France et à des visites d’exploitations agricoles françaises pratiquant l’agriculture de conservation, que Denis Vandevoorde fait connaissance de ces nouvelles techniques.  « Cette agriculture est plus exigeante et plus technique. Je dois mieux choisir le moment pour réaliser les travaux des champs » explique l’agriculteur.

Olivier Imbrecht, agriculteur à Nivelles, est convaincu que l’environnement et l’agriculture vont de pair. Il a d’ailleurs travaillé pour la promotion des mesures agro-environnementales et maintenant pour Nitrawal. Il est agriculteur après ses heures et cultive 60 hectares, superficie aujourd’hui trop petite pour faire vivre une famille des revenus de l’agriculture conventionnelle. « Je  ne pratique pas l’agriculture de conservation, les fenêtres plus strictes disponibles pour le travail des champs ne sont pas compatibles avec ma vie professionnelle d’employé.  Je n’ai pas non plus le matériel adéquat et ce ne serait pas rentable de me rééquiper ». La matière organique, il y veille : implantation de couvertures de sol en fin de saison, apports de fumier, enfouissement des pailles. Olivier Imbrecht conclut sur les raisons de son choix de l’agriculture conventionnelle : « J’ai des terres faciles : pas de problème d’érosion et d’excellents rendements. Donc pourquoi changer ».